Comprendre le Tao (Dao)


Le Tao (Dao, qui signifie Voie) occupe en Chine le coeur de la pensée philosophique et religieuse : il est la valeur suprême, la norme fondamentale. Les inscriptions sur bronze de la dynastie des Tcheou au Xème siècle avant notre ère nous rappellent que Tao désigne d'abord au sens propre un chemin. Le terme vient par extension à exprimer une façon de procéder, la voie que l'on suit, l'ordre que l'on observe. C'est ainsi que l'on peut parler du Tao  en un sens non absolu, comme le Tao de la nourriture, le Tao du Ciel, ou encore le Tao de Confucius désignant par là, respectivement, la bonne façon de se nourrir, l'ordre céleste ou la doctrine du Maître, car le Tao peut aussi signifier "dire" ou "parler".

Le Tao est conçu comme un principe unique, antérieur même au Ciel, président de la genèse de l'univers. Selon une inclinaison partagée de l'imaginaire chinois à concevoir le monde en termes de processus et de transformations, et non en termes de formes idéales ou d'essences, le tao désigne de façon absolue le cours des choses , où plutôt le principe dynamique qui le régule. Notons que jamais toutefois, par différence avec l'idée de nature en Occident, ne lui sont attribués un comportement personnel, des traits humains ou une quelconque intentionnalité. Le modèle démiurgique de création du monde est quasiment inexistant en Chine.

Transcendant, indéterminé, parfois apparenté au néant, le tao ne saurait faire l'objet d'une perception pour les sens ou d'une représentation pour la conscience. Il échappe au monde phénoménal qu'il engendre, tout en ne cessant de l'animer. Les textes canoniques par excellence de la pensée taoïste, le Lao-tseu et le Tchouang-tseu (vers les IVème siècle et IIIème siècles avant JC) le célèbrent comme le fondement de l'univers, le modèle de la conduite impartiale, et l'approchent par toutes sortes de métaphores : "Ancêtre suprême", "Femelle obscure", "Racine du Ciel et de la terre".

Le Dao imprégnant tout l'existant, le taoïste se doit d'y faire retour mais aussi de savoir s'adapter à son cycle spontané vers le non-agir.

Le Canon taoïste



Le premier inventaire officiel des écritures taoïstes, présentées à la Cour en 437, fut dressé par Lu Xiujing (406-477). L'auteur rassembla et ordonna les ouvrages en trois sections, les "3 grottes" (Sandong), et exclut les textes des Maîtres célestes, probablement parce qu'ils étaient déjà réunis dans un recueil, la Zhengyi fawen (Textes statutaires de l'Un orthodoxe), qui prit place dans la classification générale lorsque, au VIème et VIIème siècles, furent ajoutés les "4 Suppléments" (Sifu). La répartition en sept sections ainsi établie fut reprise dans la première édition du Canon à l'époque Tang (748) et maintenue dans les compilations suivantes (époques Song, Yuan et Ming) qui inclurent progressivement les ouvrages de nouveaux courants.

La subdivision du Canon en "3 Grottes" servait initialement à distinguer les ouvrages de trois courants doctrinaux différents :

- la "Grotte du Vrai" (Dongzhen) avec les textes de la Suprême Pureté centrés sur les techniques de méditation,
- la "Grotte du Mystère" (Dongxuan), avec les textes du Joyau magique centrés sur le rituel,
- la "Grotte de l'Esprit" (Dongshen), avec les textes de la tradition des Trois Augustes (Shanhuang) centrés sur l'emploi des talismans, des formules sacrées, des techniques divinatoires et des exorcismes.

Les 4 Suppléments furent divisés de la façon suivante :

- La "Section du Grand Mystère" (Taixuan Bu), rattachée à la "Grotte du Vrai" et constituée de textes centrés sur le Daode jing,
- La "Section de la Grande Paix" (Taiping Bu), rattachée à la "Grotte du Mystère" et constituée de textes fondés sur le Taiping jing (Livre de la Grande Paix),
- La "Section de la Grande Pureté" (Taiqing Bu), rattachée à la "Grotte de l'Esprit" et constituée de textes d'alchimie et de manuels de techniques de longévité,
- La "Section de l'Un orthodoxe" (Zhengyi Bu), constituée des textes des Maîtres célestes.

Le Daozang (dépot du Dao) désignait donc à l'origine l'ensemble des textes conservés dans les centres taoïstes, puis il s'appliqua aux versions du Canon patronnées par la cour impériale. La version actuelle du Canon est le Da Ming Daozang jing (dépôt des écritures taoïstes de la grande dynastie Ming), connu aussi sous le nom de Canon de l'ère Zhengtong (1436-1450).

En effet en 1406, le Maître céleste Zhang Yuchu (1361-1410) fut chargé par Ming-Yongle qui régna de 1403 à 1425 de réaliser un nouveau recueil officiel. Achevé en 1445 et imprimé en 1447, le Canon Ming réunit quelques 1500 ouvrages, de longueur variable : textes de l'école taoïste et commentaires correspondants, oeuvres révélés, littérature des différentes écoles (manuels de méditation et de liyurgie, textes médicaux et alchimiques, ouvrages hagiographiques et cosmologiques, livres de divination, d'astrologie, registres monastiques et annales de sites sacrés). Preuve de l'ouverture et de la souplesse du taoïsme. Le Canon comprend aussi des textes qui se rattachent au bouddhisme, au confucianisme et à d'autres écoles philisophiques anciennes.

Le Qi (le Tch'i) chez les Taoïstes



Notion essentielle du taoïsme, le souffle est une énergie diffuse dans tout l'univers et qui constitue le principe de formation de toute réalité. A son degré le plus raffiné, le Qi constitue l'énergie morale et spirituelle d'une personne. Il y a ainsi continuité entre le corps et l'esprit, tous deux n'étant que des productions différenciées du souffle vital. Ni matériel ni spirituel le Qi traverse le clivage classique en Occident entre les phénomènes physiques et mentaux. L'homme est une configuration d'énergie, un être capable d'agir sur le Qi afin de ralonger son temps de vie, voire d'échapper à la mort.

En tant que pratiques thérapeutiques et spirituelles, les arts du souffle oeuvrent à la santé, au sens où cette dernière désigne l'accroissement de la puissance vitale et le développemment optimal des potentiels de l'organisme. L'adepte doit nourrir et faire circuler en lui le tch'i sous sa forme la plus pure et expectorer les souffles pernicieux. Il se soumet pour cela à une ascèse émotive et affective, pour atteindre un état de calme profond, comme l'y enjoint le livre de Laozi. La pratique aujourd'hui du Qigong (exercices de travail sur le souffle pratiqué à l'origine par les taoïstes) a considérablement rendu populaire ce concept.

Le terme Daoyin (guider et tirer) désigne les techniques de gymnastique thérapeutique dont la fonction première est de favoriser la circulation harmonieuse du souffle (Qi) à l'intérieur du corps qui visent à préserver une bonne santé et obtenir une vie longue.

Les techniques de longévité, que l'on retrouve dans la médecine chinoise traditionnelle chinoise, sont dans le cadre du perfectionnement spirituel des exercices de purification préparant aux plus hautes pratiques de réalisation. Comprenant la  gymnastique, les massages, les prescriptions sexuelles et diététiques et des méthodes respiratoires, elles visent à préserver l'équilibre psychophysique, partant du présupposé que la vie dépend du souffle (Qi).

Le souffle est donc une énergie universelle qui imprègne tout, les forces vitales peuvent être réintégrées de l'extérieur par "l'ingestion du Qi" (Fuqi) ; en revanche, celles qui consistent à "retenir le Qi" (Bibi) et à le faire circuler (Xingqi) servent à favoriser la circulation harmonieuse du souffle dans lese" canaux énergétiques.

La structure architecturale du temple-monastère bouddhique


Le temple monastère bouddhique a joué un rôle essentiel dans la pénétration du bouddhisme en Chine et dans son rayonnement. Le lieu de culte toujours associé à une activité économique, le temple adopta les règles d'organisation architecturales propres à la Chine (carré, symétrie orientée, horizontalité), puisqu'il se présentait comme le lieu de représentation d'une administration céleste. Mais il apporta  la verticalité de ses pagodes, comme il renouvela, dans le domaine artistique, la statuaire.
 
C'est par milliers que l'on compta les monastères bouddhiques lors des périodes glorieuses de cette religion, mais c'est aussi par milliers qu'on les détruisit en des temps de persécution et de condamnation. Il reste donc peu de temples très anciens ; c'est pourquoi on peut citer les deux plus anciens qui subsistent sur le territoire chinois et fréquemment visités : le Nanchan si (VIIIème siècle) et le Foguan si (IXème siècle) sur le Wutai shan (Shanxi). Par ailleurs le style  de construction évolua : les dynasties des Ming et des Qing furent marquées par un grand développement de l'ornementation. Le plan le plus répandu, prépondérant à partir de la dynastie des Tang, comprend trois groupes longitudinaux de bâtiments orientés selon l'axe Nord-Sud, l'entrée du monastère étant située au Sud.

Le groupe central est le seul accessible, les deux autres étant les logements des moines ou des édifices à usage administratif. Sur l'axe médian, on trouve successivement : un mur écran contre les démons ; la grande porte d'entrée, avec les statues des deux gardiens et, parfois, de chaque côté, la tour de la Cloche et la tour du Tambour, ainsi que deux piliers hexagonaux ou ronds, gravés d'incantations bouddhiques ; la salle des quatre Rois célestes, protecteurs du monde et de la loi bouddhique, qui gardent les quatre points cardinaux ; la salle principale, laquelle abrite l'autel central, qui présente, faisant face au fidèle, une statue du Bouddha Sakyamuni, ou encore une triade bouddhique ; derrière cet autel, tournée dans la direction opposée, une statue de Guanyin ; tout autour de la salle sont représentés les arhat ; enfin, on rencontre, après la salle principale, une construction à deux étages, avec une salle de méditation ou une salle de la Loi au rez-de-chaussée et une bibliothèque à sûtras au premier étage. 

Le culte des ancêtres en Chine


Le culte des ancêtres est fondé sur de très anciennes croyances selon lesquelles l'homme est animé par des forces, des énergies et des souffles vitaux. Non seulement ceux-ci ne disparaissent pas après la mort, mais si ils sont correctement et fidèlement nourris, ils survivent pour posséder bientôt un caractère céleste, quasi-devin, qui rejaillit sur leur descendance terrestre. Au fil d'un temps mesuré à l'aune de la mémoire humaine, l'individualité de l'ancêtre s'estompe et il s'en va rejoindre la masse indistincte des esprits. les mal nourris vont quant à eux, gonfler les cohortes des fantômes errants ou furieux. C'est au cours de banquets que sont célébrés l'alliance et le partage entre les vivants et les morts, le monde visible et invisible.

Les sociétés aristocratiques Shang puis Zhou étaient organisées autour du culte rendu aux ancêtres du lignage. Chaque lignage faisait fabriquer les vases rituels destinés à des cérémonies où se retrouve toute la lignée. Ces cérémonies complexes au rituel immuable, s'organisaient autour d'un repas auquel les ancêtres étaient censés assistés ; on leur faisait des offrandes de nourritures diverses (viandes et céréales) et de boissons alcoolisées consommées et servies en libations. Les ancêtres étaient supposés disposer de pouvoirs considérables susceptibles de favoriser ou d'anéantir la prospérité de leur lignée. Du respect scrupuleux des rites dépendait le succès des guerres et la fortune du clan.

Des mages ou des membres du lignage recevaient et traduisaient la parole des défunts et leurs intentions à l'égard de leurs descendants. Au moment de l'inhumation d'un membre de la lignée, des vases rituels dont le nombre varie en fonction du rang, sont inhumés avec le défunt pour qu'il puisse aussi dans l'au-delà accomplir les rites dédiés à ses ancêtres. De magnifiques ensembles de la vaisselle du sacrifice ou des services de communion de la Chine ancienne nous sont parvenus sous la forme de vases de bronze destinés à recevoir les mets préparés et le vin des banquets ancestraux.

A l'époque des Shang, des fidèles et des serviteurs du souverain sont immolés et inhumés en même temps que lui. Les cérémonies funéraires rassemblaient le clan et ses alliés. A partir de l'époque des Royaumes combattants, le culte des ancêtres demeure mais les offrandes sont plus dédiées au profit du donateur qu'aux mânes familiales.

Rangées dans le Citang, sorte de tabernacle, à droite du tabernacle familial (Jiatang), destiné aux dieux protecteurs de la famille, les tablettes d'ancêtres étaient honorées par des offrandes de bâtonnets d'encens et de petits cierges, que l'on faisait brûler ou que l'on allumait à l'occasion des cérémonies familiales (naissances, mariages) et des fêtes du calendrier. On y ajoutait alors d'autres offrandes, par exemple des galettes, des abricots pour la fête du Nettoyage des tombes, du riz nouveau pour la fête des Murs et des Fossés (Chenghuang), dont les dieux protégeaient les villes et les villages, des fleurs de chrysanthèmes le 9ème jour du 9ème mois, une fête que l'on célébrait par des beuveries, des expositions de chrysanthèmes et des promenades sur les hauteurs.

Aujourd'hui encore en Chine de nombreuses familles rendent hommage aux ancêtres notamment à l'occasion des fêtes, mariage et naissance. En effet, malgré révolutions et modernité, le culte est demeuré vivace dans les pays chinois et sinisés. Lors de la fête des Morts, célébrée tous les 5 avril, les familles chinoises ont conservé la coutume de se rendre sur les tombes de leurs ancêtres pour y partager leur repas avec les esprits ancestraux.

Les immortels taoïstes chinois



Les immortels sont des êtres humains qui ont su se fondre avec le Dao, incarnant l'idéal taoïste le plus haut. Dès la fin des Royaumes combattants apparaissent des descriptions romanesques du paradis des immortels que l'on rejoint en fermant les yeux. Il faut cependant attendre Ke Hong (283-343 après JC) et son texte "Maître qui embrasse la simplicité", au IVème siècle pour que se constitue une typologie.

Selon lui, l'existence des immortels n'est douteuse qu'à l'homme empêtré dans la perception étroite de ses sens et qui ignore les prodigieuses métamorphoses de la nature. Cette figure prend vraiment consistance à une époque où la Chine est politiquement désunie : face à l'éthique sociale, discrète et limitée du sage confucéen, émerge un nouveau projet fondé sur le retrait de la vie publique, la reconnaissance de l'échec des arts de gouverner au profit d'une construction de soi où l'expérience et l'essai tiennent lieu de vie.
Ke Hong distingue ainsi trois types d'immortels : les "célestes" agents de la Suprême Souveraineté ; les "terrestres" qui circulent librement entre les mondes et n'ont cure de servir ; les immortels enfin "qui se sont délivrés de leur cadavre" et dont on ne retrouve, en fossoyant leur tombe, que sandales et canne.

Tous sont morts et se sont transformés. Les hagiographies relatent à l'envi leurs métamorphoses ou leur disparition, signes tangibles qu'ils ont rejoint la source vive du réel. Qui sont-ils? Ils n'ont pas de statut social défini, peuvent être marchands ou paysans. On les trouve partout : dans le mobilier, sur les miroirs, dans la religion populaire comme dans l'élite lettrée. Si les huit Immortels forment à partir du XIVème siècle un groupe homogène d'hommes et de femmes (certains ont réellement existé), ce sont le plus souvent, conformément à l'étymologie, "des hommes des montagnes" qui explorent les ciels qui s'ouvrent dans les grottes, herborisent, réduisent pierres en poudres et transmettent des arts, des diagrammes ou des signes qui à leur tour immortalisent.

Leurs pouvoirs sont nombreux : ils sont endurants, rapides, restent jeunes, contrôlent hommes et bêtes, sont guérisseurs, exorcistes, devins. Certains ont le don d'ubiquité, peuvent devenir invisible ou même voler. Mais ce sont surtout des maîtres en métamorphoses. Il donnent à lire enfin dans leur rencontre l'instabilité foncière des choses et personnalisent la transformation de soi et celle corrélative du monde. Il est rare qu'on naisse immortel. On le devient plus sûrement. A cette fin, tout est bon : l'alchimie, la cueillette des simples, les techniques respiratoires, la méditation des tables et des talismans...On peut aussi randonner au gré des occasions ou donner libre congé au savoir et privilégier l'inconscience que procurent alcools et drogues. Tout concours dans cette quête à une dispersion de soi au profit d'une union avec le Tao.

Les demeures des Immortels peuvent être situées dans des îles mythiques ou sur le sommet d'une montagne. Au nombre de ces lieux figurent le mont Kunlun, résidence de la Reine Mère de l'Occident (la Reine des Immortels), et l'île Penglai, qui, avec Fabgzhang et Yingzhou, deux autres îles mythiques, est située dans les eaux orientales.

Les principales fêtes traditionnelles chinoises


Voici les principales fêtes traditionnelles du calendrier chinois :

- La fête du Nouvel An ou fête du Printemps (Chunjie) : c'est le nouvel an chinois qui tombe deux mois lunaires après le solstice d'hiver. Sa date varie donc entre la mi-janvier et la mi-février. L'année écoulée devant s'achever dans la douceur, il est recommandé de manger sucré, de régler ses dettes et d'effacer les malheurs de l'an passé (rituel de balayage). C'est l'occasion de repeindre sa maison et de la décorer d'images du Nouvel An représentant la richesse, le bonheur, la fertilité et de se vêtir de neuf.

Les célébrations passent par d'importants banquets familiaux, lors desquels les enfants reçoivent des étrennes dans de petites enveloppes rouges. Les familles disposent d'une semaine pour rendre visite aux proches ou aux amis et déambuler dans les temples ou se déroulent foires commerciales et numéros de bateleurs. On y assiste notamment aux danse du dragon et du lion.

- La fête des lanternes (Yuanxiao jie). En ce 15ème jour du 1er mois lunaire, les parcs et sites populaires et s'illuminent de lanternes en papier fabriquées par les habitants ou les corporations. Les badauds se pressent pour les admirer.

Traditionnellement, on allumait 49 ou 108 limignons pour accueillir les divinités lors de leur descente sur terre, puis des lanternes de soie rouge pour laisser entrer les bons génies et chasser les mauvais. A cette occasion, on déguste des yuanxiao, boulettes de riz glutineux fourrées au sésame, aux cacahuètes et aux haricots rouges.

- La fête de la Pure lumière (Qingming jie). Autrefois fêtée le 15ème jour du 3ème mois lunaire, elle est fixée désormais entre le 20 et le 23 avril. Célébration bouddhiste à l'origine, elle est devenue la fête des morts et la principale manifestation du culte des ancêtres. Ce jour-là, dans les campagnes, on se rend en famille auprès des tombes ancestrales, dispersées autour parmi les cultures. Les sépultures sont nettoyées. On adresse aux morts des offrandes, sous forme de couronnes de fleurs de papier blanc et de monnaie factice, consumées pour renouveler le viatique du défunt, avant de conclure le rituel sur une explosion de pétards et un grand pique-nique. Les citadins, faute de cimetières à visiter, se rendent dans les temples bouddhiques pour entrer en contact avec leurs proches. 

Quantités de cadeaux leur sont adressés pour assurer leur bien-être, sous la forme de reproductions en papier à brûler de tout ce qui est nécessaire dans la nouvelle société de consommation, depuis la résidence de luxe à la voiture, en passant par l'électroménager. La fête de Qingming n'est pas chômée, mais considérée comme néfaste aux initiatives en matière d'entreprise, quelle qu'elle soit.

- La fête des Cerfs-Volants. Elle a lieu autour du 15ème jour du 3ème mois, pour avoir été autrefois liée à la fête de Pure lumière. Elle est particulièrement célébrée à Weifang, où se déroule un festival international de lancer de cerfs-volants.

- La fête de Mazu (Huanghui ou Niangnianghui). Le 23ème jour du 3ème mois lunaire, la déesse des marins est célébrée dans tous ses grands temples des régions côtières, en particulier à Fujian et à Hong Kong. L'effigie de Mazu est alors promenée dans les rues, juchée sur un petit bateau. De nombreuses processions ont également lieu dans les temples taoïstes.

- La fête du Double Cinq (Duanwu jie). En ce 5ème jour de la 5ème lune, on commémore le suicide par loyauté du poète Qu Yuan (340-278 av JC). Comme il s'était noyé dans le Yangzi jiang, les gens y avaient jeté des boulettes de riz, afin que les poissons s'en repaissent et laissent tranquille le corps du poète. Depuis on déguste à sa mémoire des zongzi, pâtés de riz enveloppés dans une feuille de bambou et fourrés de jujubes, marrons, jambon...Sur les lacs et les rivières, des courses en bateaux symbolisant des combats de dragons rappellent une ancienne fête des Eaux.

- La fête du Double Sept (Qixi jie). Le 7ème jour du 7ème mois lunaire célèbre les retrouvailles du Bouvier (Altaïr) et de la tisserande (Véga), divinités stellaires qui, ce jour-là seulement, sont autorisées à se rencontrer. Les pies font un pont de leurs ailes permettant aux amants séparés de franchir la Voie lactée pour se retrouver. Ce soir-là, les célibataires implorent la tisserande de leur trouver un compagnon.

- La fête de la Mi-Automne (Zongqiu jie). Le 15ème jour du 8ème mois correspond à l'équinoxe d'automne, c'est le moment de déguster les yuebing, gâteaux en forme de lune pleine, extrêmement nourrissants, fourrés de cacahuètes, sésame, noix, pâte de haricot. De nombreux parcs sont ouverts tard le soir pour y admirer la lumière de la pleine lune.

- La Fête du Double Neuf (Chongyang). Les gâteaux du Chongyang sont confectionnés en ce 9ème jour du 9ème mois lunaire. Afin d'honorer les personnes âgées, il est également coutume de leur offrir un bol de nouilles, symbole de longévité.

Le monastère bouddhique de Guangsheng




Le monastère bouddhique de Guangsheng (Guangsheng si) est situé sur les flancs du houshan, haute colline du district de Hongdong, fut fondé en 147, au temps des Han de l'Est (25-220), sous le nom de monastère du Krosa (Julushe si). Les Tang, qui le reconstruisirent en 769, le rebaptisèrent temple de la Victoire (Guangsheng si) pour commémorer la fin de la rébellion d'An Lushan. Les bâtiments actuellement visibles datent des Yuan (1276-1368) et des Ming (1368-1644).

Le monastère est composé de deux parties. Au pied de la colline se trouve le temple du Dieu des Eaux (Shuishen miao), dont la salle de la Réponse resplendissante (Mingying dian) est décorée de peintures murales éxécutées en 1324, sous la dynastie des Yuan. Sur un paroi, le dieu des Eaux, siégeant au milieu de ses courtisans, roule des yeux terribles. A ses pieds, un mandarin de district implore humblement des pluies bénéfiques. De jolies scènes de vie quotidienne (concubines se coiffant, achat de poisson à un marchand ambulant) figurent l'existence dans les appartements privés du dieu. face à la statue de la divinité, la troupe de l'actrice Zhong Duxiu s'apprête à donner une représentationd'opéra zaju pour le plaisir du dieu. Cette dernière peinture est considérée comme un document capital par les historiens du théâtre chinois.

Le monastère du Haut est dominé par une pagode (Feihong ta ou pagode Arc-en-Ciel), érigée en 1516-1527, superbe tour octogonale de 47 m de haut et de 12 étages en brique. Les corniches sont décorées de faïence émaillée polychrome représentant bouddhas, boddhisattva, dieux-gardiens, animaux fabuleux, fleurs, éléments d'architecture, figures géométriques de toutes les couleurs, justifiant ainsi le nom de la pagode.

Le Vrai Classique du Sud Fleuri, un texte fondateur du taoïsme



Ecrit par Zhuangzi, auteur contemporain aux Royaumes combattants (453-221 av JC) et l'un des père fondateur du taoïsme, Le Vrai Classique du Sud Fleuri (aussi nommé Zhuangzi, comme son auteur), fournira à la Chine non seulement une réserve inépuisable de réflexions sur le pouvoir, le language, la culture de soi et les rapports entre l'homme et la nature, mais aussi une source d'inspiration intarissable pour les littérateurs, les poètes et les peintres chinois pendant plus de deux millénaires.

Cette oeuvre en 33 chapitres, est divisée en trois sections : les chapitres intérieurs (1 à 7), les chapitres extérieurs (8 à 22) et les chapitres mixtes (23 à 33).

Dès les premiers mots de son texte, Zhuangzi donne le ton et met en scène des données fondamentales de la cosmologie chinoise. Le poisson émergeant de l'Obscurité du Grand Nord n'est autre que le symbole du yin en proie à la mutation qui fait advenir en son sein le yang à mesure qu'il se transforme en oiseau et s'élance vers la lumière du Sud. N'oublions pas que le Nord, l'Obscur, dans le taoïsme, est le lieu de l'indistinction et du chaos d'où provient et où tout fait retour. Le titre du premier chapitre est révélateur car chez Zhuangzi, l'Homme Véritable s'affranchit des pesanteurs rituelles et conventionnelles propres au confucianisme, en s'adonnant à la randonnée intérieure afin d'être de plain-pied avec la source
du dynamisme des êtres, le principe de toute chose : le Dao.

Seule la "grande connaissance" peut opérer ce retour vers l'indifférencié par l'ascèse, dont l'extase n'est pas absente et dont le but est le perfectionnement de soi, et conduire l'adepte à faire de son énergie vitale qi (le soufffle qui constitue le cosmos) une force spirituelle shen qui n'est autre que celle qui anime l'univers.
En ce sens, Le Vrai Classique du Sud Fleuri, texte où le thème de la transformation de soi occupe une large place, deviendra, au même titre que le recueil d'aphorismes du célèbre Laozi, le classique de la Voie et de la vertu, un vade-mecum aussi bien à l'usage des lettrés que des moines, et ceci jusqu'à nos jours. En effet, c'est dans Le Vrai Classique du Sud Fleuri que sont abordés certains thèmes centraux de la démarche de perfectionnement de soi (gongfu) comme la spontanéité, la non-dépendance ou le non-agir, qui mettent en jeu des pratiques telles que la "méditation assise" ou le "jeûne de l'esprit".

Autant de "recettes" qui ont pour but l'union "au ressort céleste", métaphore désignant la dimension active et dynamique du Chaos primordial et de l'Origine. Dans le taoïsme, les pratiques psycho-physiologiques sont destinées à développer une perception intériorisée, l'oeil et l'ouïe communiquent par l'intérieur, un entendement qui se passe de concepts et permet à l'individu d'accéder à un état de réceptivité exceptionnelle dans lequel il peut échapper à la fragmentation de la conscience résultant de l'usage trivial de la pensée et des sens. Le type de réceptivité que développe ainsi l'adepte du taoïsme lui
octroie une liberté qui ne consiste pas échapper à la causalité déterminante de la nature, mais au contraire à ne faire qu'un avec la spontanéité de la mutation incessante qui oeuvre au sein de la réalité.

C'est cet oubli volontaire de la réflexion qu'illustre la célèbre histoire du cuisinier Ding ou Zhuangzi nous montre que la maîtrise de la découpe d'un boeuf passe par la même spontanéité apprise que celle exigée lorsqu'on veut accéder aux mystérieux dynamisme qui préside au mouvement des êtres.

Xuantian Shangdi, le dieu chinois tueur de démons


 Xuantian Shangdi, appelé aussi Zhenwu (guerrier parfait) ou Xuanwu (guerrier obscur) est une divinité taoïste dotée de pouvoirs de guérison et d’exorcisme dont les origines remontent au IIIème siècle avant JC.

Xuanwu est un pourfendeur de démons et un autre directeur du destin, responsable des registres de vie et de mort, qui réceptionne les rapports communiqués par les Trois Cadavres, les dieux censeurs du corps humain.

L'empereur Song Zhenzong (qui régna de 998 à 1022) fit construire son premier temple à son honneur dans la capitale Kaifeng.

A l'époque Yuan, il fut associé officiellement au mont Wudang et élevé au rang impérial avec le titre de Suprême Empereur du Ciel obscur en 1304. Sous les Ming, on le considéra comme la 82ème manifestation de Lao-tseu. Fut alors fondé un vaste complexe religieux, spécialisé dans les exorcismes et les arts martiaux. Le mont fut rebaptisé Wudang (Résistance martiale).

L'Empereur Yongle, l'un de ses fidèles les plus sincères, le choisit comme divinité tutélaire de sa dynastie. Il lui consacra un temple au sein de la Cité interdite à Pékin, et commandita la construction et la restauration de sites du mont Wudang, lequel acquit une importance supérieure à celles des 5 pics.

A partir de l'époque Ming, Zhenwu est représenté sous les traits d'un guerrier aux longs cheveux  et aux pieds nus, portant un large manteau par-dessus son armure et l'épée des 7 étoiles, référence à la constellation de l'Ourse. A ses pieds figure souvent un serpent enroulant ses anneaux autour d'une tortue (Xuanwu). on l'appelle parfois le suprême Empereur du Ciel obscur.

Le panthéon taoïste


Le panthéon taoïste est un système ouvert et en constante transformation. Il fut souvent restructuré et élargi au fil des siècles, mais conserva toujours un ordre hiérarchique rigoureux. On ne présentera ici que les divinités centrales du taoïsme moderne. Si certaines sont apparues tardivement et doivent leur origine à l'émergence de courants ou aux influences bouddhiste et confucianiste, d'autres ont une histoire de plus de vingt siècles, durant lesquels leurs positions ont varié selon leur popularité.

Cette dernière était souvent déterminée par les cours dynastiques, qui avaient le pouvoir de conférer rang et titres célestes. A l'époque Song ont ajouta les divinités bouddhistes et les dieux populaires, qui étaient quant à eux tenus cependant pour "impurs". En outre, dès l'origine, le taoïsme eut une attitude ambiguë vis-à-vis des cultes locaux, s'en tenant officiellement à distance tout en s'appropriant certains aspects. De nombreuses divinités populaires furent ainsi incluses dans les rangs inférieurs du panthéon à travers de véritables investitures qui les assujettissaient à cause de l'orthodoxie.

A toutes les époques, elles restèrent bien distinctes des divinités "pures", considérées comme des émanations du Dao et liées à la révélation des écritures sacrées.  

Entre ces deux catégories prenait place le vaste groupe des Immortels ; on pensait que ces personnages semi-légendaires avaient accédé à la réalisation spirituelle grâce à des techniques de purification intérieure.

A partir de la fin des 6 dynasties, le sommet du panthéon, d'abord occupé par le Suprême seigneur Lao ou par l'un suprême, revint au vénérable céleste de l'Origine primordiale. L’Empereur de Jade, nommé divinité suprême par décret impérial du XIème siècle, est souverain quant à lui des divinités populaires, sa position est donc hiérarchiquement inférieure à celle des 3 vénérables célestes.


Il existe plusieurs versions du panthéon. Selon la tradition, le corps démembré de Lao-tseu donna naissance à l'univers. A l'inverse l'univers se retrouve au complet dans le corps. Chaque organe abrite une divinité : la Reine-Mère d'Occident (la lune) dans l'oeil droit et le Duc-Roi d'Orient (le soleil) dans l’œil gauche forment une triade avec T'ai-yi, le Grand Un, dans le cerveau.

Selon une autre version, les hiérarchies célestes du taoïsme peuvent être classées selon une tripartition qui se présente comme une reproduction de l'organisation humaine (cour impériale, fonctionnaires et peuple). Le premier niveau est occupé par les divinités du ciel antérieur (xiantian), qui existent avant la manifestation du Ciel et de la Terre, c'est à dire avant l'union de Yin et Yang dans la cosmogonie taoïste ; y sont inclus les 3 Vénérables célestes, les 4 Ministres célestes, les 3 Fonctionnaires et les divinités des astres. Le deuxième niveau est occupé par les Immortels qui, ayant atteint la réalisation après la création du Ciel, sont appelés divinités du ciel postérieur (houtian). Enfin le niveau le plus bas est occupé par les divinités de la religion populaire.

A partir des Song, une prééminence fut donnée à une série de protecteurs d'aspect martial parmi lesquels figurent le Guerrier Obscur (Xuangwu) et le Tueur noir (Heisha ou Yisheng), tous deux liés aux nouvelles pratiques d'exorcisme qui apparaissent alors.

Les Maîtres célèstes du taoïsme


L'éclosion d'un courant religieux du taoïsme au IIème siècle après JC, se présenta comme un sursaut réformiste face à la prolifération des cultes locaux voués à des héros défunts et à la dérive sanguinaire des sacrifices qui leurs étaient adressés. En 142, un dénommé Zhang Daoling (en photo), retiré dans les monts Heming dans le Shu pour s'adonner à la quête de l'immortalité, fut visité par une apparition de Laozi qui l'enjoignit de fonder une communauté de purs, combattant les croyances immorales pour ne se vouer qu'au culte du Dao. Zhang fonda une organisation dont les membres, dans la plus stricte égalité des sexes, devaient adopter un mode de vie frugal et suivre un ensemble de préceptes reposant sur le respect de la vie et de la nature.

Zhang Lu, son petit fils, reprit le flambeau en 191. La communauté devint si importante qu'elle s'érigea en État autonome, basé à Hangzong, aux confins du Shu et du Shaanxi, dans une région largement peuplée d'ethnies non Han, dont les cultes et les croyances imprégnèrent l'organisation taoïste. Fondée sur l'autorité d'une lignée de patriarches dont la charge se transmettait par voie héréditaire depuis Zhang Daoling, elle prit le nom de Voie des Maîtres célestes. Elle était organisée en paroisses, dont les sièges étaient les montagnes et autres lieux sacrés investis par la ferveur populaire.

Les fidèles s'y réunissaient au cours de trois assemblées annuelles (les 1er, 7ème et 10ème mois) pour confesser leurs fautes et verser à l’Église une contribution de riz. Obole qui valu à la communauté des Zhang son sobriquet de "secte des cinq boisseaux de riz". L’État des Maîtres Célestes fut démantelé par Cao Cao en 215. Ses patriarches restèrent autorisés à enseigner à condition de se rapprocher du centre du pouvoir.

Après une très large diffusion dans la Chine du Nord à l'époque des Trois Royaumes, le mouvement gagna la Chine du Sud à l'époque des Six Dynasties. Sous le nom de Xuanxue "École des Arcanes", il prit un tour plus individuel que communautaire et une colorisation ésotérique, bâtie sur les expérimentations alchimiques et la méditation visionnaire. Au VIème siècle, le courant du Joyau Magique développa les traditions médiumniques toujours en usage dans la liturgie taoïste moderne.

Sous l'influence du bouddhisme, le taoïsme religieux connut un grand renouveau entre le Xème et le XIVème siècle. Les pratiques d'immortalité anciennes évoluèrent vers l'approche empreinte de spiritualité du neidan ou "alchimie intérieure" qui enseigne une médiation centrée sur l'écho dans le corps humain des grands mécanismes naturels universels. Le neidan devint la voie préconisée par le nouvel ordre taoïste du Véritable Total, apparu vers 1170 et qui constitua avec la Puissante Alliance de la Vérité et de l'Unité, les deux grands courants du renouveau taoïste à compter de la dynastie Yuan des mongols.

Parmi les patriarches des Maîtres célestes on compte Zhang Jixian (1092-1126), zhang Zengchang (1335-1378), Zhang Yushu (1361-1410). En 1949, Zhang Enpu (1904-1969), 63ème patriarche, abandonna le siège central de l’obédience sur le mont Longshu pour s'établir à Taïwan, ou réside aujourd'hui encore le dernier, et controversé, Maître céleste, Zhang Yuanxian.

La grotte de la flûte de roseau, un lieu légendaire chinois


Dans le paysage calcaire des collines de Guilin en Chine, se cachent des grottes extraordinaires visitées chaque année par des milliers de touristes. La plus connue, celle de la Flûte de roseau, doit son nom aux roseaux touffus qui poussaient jadis devant l'entrée et dont on faisait des instruments de musique. La caverne, longue de plus de 250 mètres, fut découverte sous la dynastie des Tang (618-907). Puis, pendant longtemps, seule la population locale, qui venait régulièrement s'y réfugier pour échapper aux bandits ou aux soldats, s'intéressa à son existence.

La grande salle intérieure, qui peut accueillir jusqu’à 1000 personnes, a été baptisée le Palais de cristal. Divisé en deux parties par un lac, elle est hérissée en stalagmites et stalactites. Les étranges concrétions calcaires, éclairées par des lumières électriques multicolores, évoquent des arbres noueux, d'épais arbustes, des animaux tels que chevaux, lions et bêtes féroces, et même des instruments de musique. De partout jaillissent de superbes couleurs rappelant le corail, l'agate, l'ambre et le jade.

Parmi les formes humaines sculptées par la nature figure le Vieux Sage. Il aurait été changé en pierre après avoir vainement tenté d'exprimer en vers la beauté du site. Selon la vieille légende du Voyage vers l'Occident, la grotte fut le palais, rempli de trésors, du roi Dragon.

Cette histoire, très populaire, relate les aventures d'un pèlerin chinois qui se rendait en Inde pour recueillir des textes bouddhiques originaux. Il voyagea en compagnie du roi Singe. Dans la grotte de la Flûte en roseau, ce dernier détruisit l'armée du roi Dragon, constituée de généraux crabes, de soldats crevettes, escargots et méduses qu'il laissa pétrifiés sur le sol. Un gros rocher de calcaire blanc serait l'aiguille magique utilisée par l'assiégé pour se défendre. 

Le Daode jing, le livre de la Voie et de la Vertu


Le Daode jing, le livre de la Voie et de la Vertu est un texte fondateur du taoïsme. D'après la tradition Laozi remis le texte à Yin Xi, le gardien de la passe de Hangu, avant de poursuivre son voyage vers l'Occident. C'est un chef-d’œuvre de la littérature chinoise et l'un des principaux textes liturgiques taoïstes sur lesquels méditer. D'un style sobre et concis, il rassemble en 81 chapitres quelques 5000 mots répartis en deux sections consacrées respectivement à la Voie et à la Vertu.

On y trouve des thèmes fondamentaux : la spontanéité et le non-agir, l'idée de retour et l'exaltation du laisser-aller au cours des choses, renvoyant tous à différents domaines, comme la métaphysique, la culture et l'art de gouverner. La version transmise du Daode jing, compilée selon la tradition, au IVème siècle av JC, date sans doute des premiers siècles de notre ère.

Suivre la Voie implique pour Laozi de rompre avec la société et ses milles désirs, à commencer par celui d'apprendre. Contre l'amour de l'étude prôné par Confucius, Laozi préfère "apprendre à désapprendre" et s'enfermer en lui-même pour accomplir le mouvement de "retour" (fan) à l'oeuvre en toute chose. S'excluant de la foule qui parle sans retenue, s'agite et se disperse dans le divers, il se dépeint lui-même dans un passage fameux comme un idiot mutique, délaissé de tous et concentré sur l'Un.

Ainsi la culture de soi est-elle une quête solitaire : nul romantisme dans cette idée mais seulement la conscience aiguë que la frénésie sociale détourne de la vraie souveraineté. Le monachisme taoïste, ainsi que l'isolement de l'empereur dans la Cité interdite, sont en germe dans Laozi.

Le Saint (l'être asocial et insaisissable, exerçant partout une influence souveraine) auquel fait référence Laozi, se situe au delà du bien et du mal : en dépit des choix moraux de la société, il sait que le négatif est impliqué dans le positif, que la beauté est cernée de laideur, yin et yang, scandant partout le rythme de leur alternance.

Il sait aussi que la vigueur expansive, lumineuse et masculine du yang où les humains se complaisent, finit toujours dans la raideur des cadavres. Aussi préfère t-il cultiver le yin féminin, dans le souci de faire place en soi à ce vide qui circonscrit toute existence et lui donne sa force.

L'image du nouveau-né, bloc d'énergie contenue et de nature brute, incarne bien le paradoxe de cette faiblesse invulnérable : elle alimentera dans le taoïsme des pratiques de Longue vie, destinées à réveiller en nous l'embryon immortel.

Nul égocentrisme dans cette quête de souveraineté intérieure : se prendre soi-même pour l'objet de l'action est en effet la meilleure façon d'échouer, et ce n'est que lorsque le Saint, à l'image du Ciel-Terre, "ne vit pas pour lui-même" que la vie se fait en lui surabondante. La vraie spontanéité consiste donc à laisser faire en soi-même ce qui "va de soi" (zi ran), sans se crisper sur un soi conquérant. De même, la vertu n'est vraiment vertu que de s'ignorer telle, et si les vertus confucéennes manquent leur but, c'est de n'être qu'une nomenclature qui voudrait baliser la conduite. par ses paradoxes ravageurs, laozi semble vouloir en délier le sens, pour mieux redonner à la vie qu'elles enserrent sa puissance d'aller.

Zhuangzi, un des pères fondateur du taoïsme


Zhuangzi est un personnage énigmatique de la période des Royaumes Combattants (453-221 av JC) a joué un rôle fondamental dans le développement du taoïsme en tant que philosophie.

C'est le plus éminent prosateur  de son époque, et à certains égards, le fondateur de la prose classique autant que le "codécouvreur" du taoïsme philosophique. Si il prolonge la pensée de Laozi, il l'illustre surtout de merveilleux récits qui mettent en scène un monde de fous, d'originaux, de personnages plus ou moins tordus.

Son biographe, Sima Qian, se dit d'ailleurs éperdu d'admiration mais aussi saisi par le désarroi devant une telle floraison d'images, "dont on ne peut tirer aucun profit".

Zhuangzi semble être l'initiateur d'une forme d'écriture qui fit ensuite florès, le "court récit", ou apologue, en particulier avec son successeur idéologique, Liezi, qui le plagia moult fois.

Contrairement à Laozi, Zhuangzi s'intéressait fort peu au monde politique et visait surtout à faire retour à la nature et au Dao, la Voie. On vit souvent en lui une espèce de mystique rêvant de se fondre dans le Grand Tout, l'Un identifié au Dao. Il ferrailla, parfois durement, contre Confucius et ses adeptes parce qu'ils voulaient faire du monde malgré lui. Ne faut-il pas plutôt ne pas vouloir, ne pas désirer, en un mot ne pas agir?

Son oeuvre, le Vrai Classique du Sud Fleuri, composée de trente-trois chapitres, est extrêmement composite et assurément compilée à une époque tardive, quoique sa partie la plus ancienne passe pour être authentique. Elle est un éblouissement de l'intellect qui égare plus qu'elle n'oriente, pour le plus grand plaisir de l'esprit.

Le Yin et le Yang



Le Yin désignait à l'origine le versant d'une colline à l'ombre (Nord), Yang désignait le versant exposé au soleil (Sud). D'un point de vue cosmogonique, Yin et Yang constituent une première diversification de l'Unité ou de Souffle primordial, à laquelle ils imposent des directions en déterminant la manifestation graduelle des 10.000 entités (ou êtres). Dans la cosmologie, Yin et Yang classent la réalité selon un système binaire dans lequel les opposés, loin d'être inconciliables, sont complémentaires et interdépendants ; chacun contenant le germe de l'autre, ils sont en mutation constante, état caractérisé par des phases d'expansion et de contraction.

Yin est associé au féminin et la Terre, Yang au masculin et au Ciel, jusqu'à comprendre tous les aspects subtils et grossiers du monde, liés entre eux en vertu du principe de la résonance. Vers le IIIème siècle avant notre ère, le couple Yin-Yang fut associé aux théories des 5 éléments et des trigrammes et hexagrammes, créant une grille cosmologique complexe et articulée, en usage aujourd'hui dans une vaste série de sciences. Ces principes furent aussi adoptés par le taoïsme ; il les appliqua notamment dans le cadre des diverses techniques de perfectionnement spirituel. Le but de la méthode alchimique, qui met l'accent sur le concept "d'inversion" (ni), est appelé Pur yang et doit être entendu comme l'état indifférencié à l'origine de la manifestation auquel on accède en suivant un parcours inverse du cours naturel, qui tend vers le déclin et la mort (Yin).

Le symbole du Taiji (en photo), illustre visuellement le principe de la nécessaire corrélation entre Yin et Yang, chacun de ceux-ci étant en germe dans son opposé. Le dynamisme de l'image renvoie à leur mouvement constant, dans lequel l'apogée de l'un entraîne celui de l'autre.

L'une des plus ancienne classification binaire de la réalité est mentionnée dans un manuscrit du IIIème siècle avant notre ère retrouvé à Mawangdui (Changsha, Hunan), dans lequel figurent les paires d'opposés suivantes : Terre-Ciel, Automne-Printemps, Hiver-Été, Nuit-Jour, Petit État-Grand État, État sans influence-Etat influent, Non action-Action, Contraction-Expansion, Ministre-Souverain, Dessous-Dessus, Femme-Homme, Fils-Père, Frère cadet-Frère ainé, Jeune-Vieux, Silence-Parole.

Laozi/Lao-tseu, le père du taoïsme



Laozi/Lao-tseu (570-490 av JC) est un philosophe chinois qui selon la légende serait né à Chu, sous un prunier. Il semble que se réfère aussi à sa naissance le nom Li (prunier) qui lui est attribué au Ier siècle avant JC. Il apparaît dans diverses sources sous le nom de Lao Dan. Il est devenu un personnage mythique tenu par la tradition pour être l'auteur du Dao dejing (ses enseignements), ouvrage fondamental de la culture chinoise. Les textes les plus anciens du Zhuangzi datant du IVème siècle avant JC évoquent la mort d'un certain Lao Tan et la discrétion du sage. Il faut attendre les Mémoires historiques (Shiji) de Sima Qian terminés autour de 100 avant notre ère pour que se fixent les traditions. Il n'existe aucune preuve scientifique de l'existence de Laozi. On raconte qu'il se promenait souvent à dos de buffle.

L'historigraphie officielle en fait un devin-annalyste de la cour durant la dynastie des Zhou, mais qui fut vite fatigué de cette tâche peu conforme à ses ambitions et à sa conception du monde. Plutôt que de retranscrire les évènements passés et de prévoir l'avenir au seul service du souverain, il se pencha sur le mystère des choses et des êtres. A partir de sa connaissance du Dao, la Voie, telle qu'elle est enseignée par le Yijing, le classique des changements, il construisit un nouveau modèle d'explication et l'appliqua à son idéal, celui du saint.

Il devient alors un contemporain de Confucius (551-479) mais plus âgé que lui, qu'il morigène pour son arrogance. Il disparaît ensuite vers l'ouest et quitte la Chine (pour l'Inde selon certaines sources), déçu par la situation de l'époque. Sa divinisation est acquise en 166, il devient Li Hong ou Suprême Seigneur Lao, quand l'empereur Houan de la dynastie des Han sacrifie personnellement à un Laozi cosmique, dont rend compte le texte de "L’inscription". Cette figure semble particulièrement en honneur parmi les hommes de guerre mais le livre sert aussi aux dames de la cour de manuel de pratiques sexuelles censées renforcer la fertilité. Pour les taoïstes, le Seigneur Lao est au pinacle du panthéon. Ce Laozi divinisé renait régulièrement et va et vient dans le monde des hommes. Il demeure selon les versions dans la Grande Ourse ou dans le ventre de sa mère. Il fut alors inclus dans la Triade des 3 Vénérables célestes.

Parrallèlement, la lente diffusion du Laozi produit une exaltation mystique qui fait du personnage mythique un sauveur. Pour le courant des Maîtres Célestes reconnu comme église en 215, Laozi n'est plus le "Vieux Maître" mais le "Vénérable Prince de la Suprême Souveraineté".

Au cours du Vème siècle, les églises taoïstes devant se positionner face au bouddhisme, Laozi devint celui qui, parti vers l'ouest, initia les barbares à un message qu'ils méconnurent et attribuèrent au Bouddha. De cette divinisation, un trait est saillant : le corps de Laozi est un corps de transformation. Il change neuf fois en une journée. Sa gestation de quatre vingt-un ans fait de lui un "Vieil Enfant". L'imagerie le place au centre d'un vaste complexe de mythes, de nombres et de symboles. En parcourant mentalement son corps, de Laozi, l'adepte taoïste fait descendre en lui la puissance qu'il incarne. Il se rend alors immortel.
 
Le culte de Laozi connut son moment de gloire sous les empereurs Tang, en particulier sous Gaozong (régna de 649 à 683) et Xuanzong (régna de 712 à 756). Ce dernier ordonna que des temples taoïstes consacrés au "Vieux Maître" fussent ouverts dans la capitale de chaque province de l'empire.

Le Yijing, le livre des mutations


Le Yijing (Livre des Mutations) occupe une place centrale dans le taoïsme mais est aussi l'un des des Cinq Classiques confucéens. Manuel de divination et livre de sagesse, il a été composé par étapes successives entre la fin des Zhou occidentaux (1050-770 av JC) et les Royaumes Combattants (453-221 av JC). Il s'organise autour de soixante-quatre hexagrammes, permutations de six lignes pleines ou brisées. A chaque figure sont attribués un nom et une formule oraculaire ; chacun des six traits de l'hexagramme est caractérisé par un oracle.

Le Yijing inclut en outre sept commentaires distincts, parmi lesquels trois se subdivisent en deux pour former les Dix Ailes. Les hexagrammes, leurs noms et oracles constituent le Zhouyi (Mutations des Zhou) ; le Zhouyi et les Dix Ailes, le texte canonique du Yijing.

La tradition attribue l'ouvrage à l'inspiration conjointe de quatre sages : Fuxi, le roi Wen, le duc de Zhou et Confucius ; ils auraient constitué les figures, formulé les oracles, et rédigéles Dix Ailes. 

Un tel développement, linéaire et idéal, n'est pas corroboré par les sources archéologiques. L'étude de l'élaboration du Zhouyi est cependant malaisée dans la mesure où le processus de formation des figures mantiques est incertain et l'agrégation des oracles pose problème. Issu d'une tradition de devins reprise par des scribes royaux pour s'inscrire dans un enseignement de sagesse, ou projet d'emblée politico-moral sous-tendu par l'activité spéculative de lettrés, le Zhouyi tend, sous la période des Printemps et Automnes (722-481 av JC) à s'affranchir de la tradition divinatoire dont il est probablement issu pour former une rationalisation du changement.

C'est l'adjonction progressive des Dix Ailes vers le IIIème siècle avant JC qui marque la systématisation de l’œuvre et son intégration aux mouvements cosmologiques contemporains. Les figures et formules attachées sont interprétées sous un angle philosophique ; réplique de l'univers, le sage y lit le monde et ses transformations.

Les traits constitutifs des hexagrammes, brisés et pleins, deviennent images respectives du yin et du yang issus de l'unité primordiale, grand vide indifférencié. Le Ciel donne l'impulsion par le yang, la Terre se conforme par le yin, leur activité induit la multiplicité des phénomènes dont huit trigrammes, issus de la combinaison de ces deux monogrammes premiers, constituent les images fondamentales. Les soixante-quatre hexagrammes, à leur tour issus de la combinaison de ces huit trigrammes, en viennent à constituer la réplique de l'ordre universel ou infini des possibles, chacun d'eux dessinant la tournure d'une situation donnée, à un moment particulier. 

Chaque formule attachée aux traits est introduite par la désignation de sa position au sein de la figure selon un mouvement ascendant. Les formes d'interaction des six traits, couplés à la structuration des trigrammes au sein de l'hexagramme, déterminent l'archéologie de la situation.

Un dispositif de lecture des transformations de l'univers est inféré de la lecture des figures ; l'interprétation des formules attachées engendre la systématisation d'un vocabulaire de la transformation. L'activité humaine est intégrée aux modes de constitution des figures, la position du sage ou de l'homme de peu est retranscrite par celle des traits. De la dualité complémentaire du yin et du yang naissent l'harmonie, la potentialité, l'adéquation et l'humanité, qualités des traits au sein des hexagrammes et des hommes en société. De la mise en mouvement des situations naissent leurs interactions et transformations.

Transcendant les modèles symboliques, le Yijing fait l'objet d'une quantification réelle sous les Han (206 avant JC-220 après JC). Le calendrier impérial est basé sur la combinatoire de ses figures et la structure de son contenu fonde les disciplines du savoir en Chine.

La légende de Duangu et Guanyin


Duangu et sa belle-sœur avaient pris le bateau pour venir faire leurs dévotions à la déesse Guanyin, sur l'île de Putuo dans l'archipel des Zhoushan. Alors que le bateau atteignait le rivage, Soeur Duangu tomba gravement malade et dut renoncer à faire l'ascension de la montagne. Sa belle-sœur partit donc seule prier Guanyin, déesse de la Miséricorde. le soleil atteignait son zénith quand le vent se leva, emportant le navire loin du rivage.

Restée seule à bord et alitée, Soeur Duangu se sentit prise d'effroi tandis que la faim la tenaillait. Alors qu'elle s'abandonnait au désespoir, une femme vêtue de blanc apparut sur le rivage, portant un panier de provisions. L'apparition prit une poignée de galets et la jeta dans la mer. A peine les pierres eurent-elles touché l'eau qu'elles se transformèrent en une chaussée sur laquelle la femme en blanc s'engagea pour approcher le bateau.

Elle déposa son panier à bord et disparut aussitôt. De retour à bord, la belle-sœur, en écoutant le récit de Duangu comprit aussitôt que l'apparition n'était autre que Guanyin. Prenant Duangu sur son dos, elle la conduisit au temple de la déesse pour la remercier de sa miséricorde. Ô stupeur, quand elles parvinrent auprès de l'autel, le bas de la robe de Guanyin était encore tout mouillé.  

Zhanxu, l'Empereur du Nord


Zhanxu était le fils de Changyi et le neveu de Shaoshao, sa mère s’appelait Jingpu. Vers la fin du temps de Shaohao, il apparut un phénomène étrange dans le ciel : l'étoile Yaogang de la Grande Ourse passa soudain à travers la lune. Jingpu, concubine impériale du Seigneur Changyi qui habitait dans le palais Youfang, devint enceinte du passage de l'étoile Yaogang.

Plus tard, le Seigneur Changyi se dégrada et s'expatria dans les régions lointaines au sud-ouest, au bord de la rivière Ruoshi. Jingpu l'accompagna et accoucha d'un garçon portant un bouclier et une hallebarde. Cela annonçait que Zhanxu deviendrait un chevalier et remporterait le succès à la force. Surdoué, Zhanxu fut capable d'assister Shaohao à l'âge de dix ans, ressembla à un adulte à douze ans et devint l'Empereur quand il eut seulement vingt ans.

Il établit sa capitale à Diqiu (à l'actuel Puyang, Henan). Pour sauvegarder la paix, il surveilla le pays au dragon tous les jours et patrouilla dans toutes les régions où les lumières du soleil parvenaient. Au retour au Palais impérial, il ordonna à son dragon volant d'imiter les bruits du vent et créa un morceau de musique, Chengyun (les Nuages), qu'il présenta à l'Empereur jaune.

L'Empereur jaune appréciait beaucoup Zhuanxu, et lui ordonna de gérer l'univers à sa place. Arrivé au pouvoir, Zhanxu se prit à couper le passage entre le ciel et la terre. A cette époque-là, le ciel et la terre étaient séparés, mais il existait quand même des échelles et des piliers liant les deux. Les divinités et les sorciers faisaient le va-et-vient entre le ciel et la terre à travers ces passages. En même temps, des divinités vicieuses, comme Chiyou, en profitaient et causaient beaucoup de troubles sur terre. Bien que Chiyou fût tué à la fin du combat, l'ordre de l'univers fut détruit totalement. En même temps, les serviteurs favoris de Huangdi, le dragon Ying et sa fille Kui, ne purent retourner au Palais céleste à cause de leurs blessures. Zhanxu en tira une leçon et décida de couper les passages.

Il envoya deux divinité, Zhong et Li, pour accomplir cette mission. Zhong leva le ciel vers le haut avec toutes ses forces, en même temps Li pressa la terre vers le bas avec ses deux mains herculéennes. La distance entre le ciel et la terre s'élargit, et les échelles et les piliers n'ateignirent plus le ciel. De cette façon, le ciel et la terre furent séparés nettement, le Ciel était destiné spécialement aux divinités, alors que la terre constituait la seule habitation des hommes. On interdit aux divinités de descendre sur terre sans autorisation.

Pour l'humanité, il fut impossible de monter au ciel. Cela fait, Zhanxu chargea Zhong de gouverner le ciel et Li de la surveillance de la terre. En bloquant les passages, Zhanxu chargea Zong de gouverner le ciel et Li de surveiller la terre.

Dès lors on vivait dans un monde pacifique et les divinités n'osaient pas se rebeller. Fier de son exploit, Zhanxu se conduisait en despote, changeait l'ordre de l'univers à sa guise, et tyrannisait les autres divinités.

Parmi ses agissements pervers, le plus grave fut qu'il fixa le soleil, la lune et toutes les étoiles au nord, leur interdisant de se déplacer. Cela entraina des conséquences désastreuses : des endroits se trouvaient toujours sous la chaleur, les lumières aveuglaient les hommes ; d'autres endroits s'enfonçaient dans l'obscurité profonde. Toute les divinités et toutes les espèces humaines souffraient beaucoup de son oppression. La tyrannie insupportable de Zhanxu provoqua finalement la rébellion de Gonggong.

Gonggong était le fils de Zhurong, divinité du Feu, et descendant de la cinquième génération de l'Empereur du soleil Yandi, l'empereur céleste  du sud. Divinité de l'Eau, il vivait dans les contrées désertiques au nord et avait une tête humaine, deux mains, deux jambes, mais un corps de serpent. Quand il marchait, ses cheveux rouges ébouriffaient au vent. En plus des céréales, il mangeait aussi des animaux. Puisqu'il était fort et féroce, les autres divinités avaient peur de lui. Deux divinités travaillèrent sous ses ordres, Xiangku et Fuyou. Xangliu avait un visage humain et un corps de serpent, et le plus horrible, c'est qu'il avait neuf têtes qui pouvait se déplacer librement et prenaient les repas aux neuf montagnes. Partout où il passa, des marais apparurent. Quant à Fuyou, les documents anciens ne nous décrivent pas son apparence, et disent seulement qu'après sa mort, il devint un ours au poil rouge.

Xianglu et Fuyou aidèrent ensemble Gonggong à gérer les fleuves. Surpris de la rébellion de Gonggong, Zhanxu l'affronta avec ses armées sous le commandement de son subordonné Yuqiang, divinité des mers. C'est le plus grand combat entre les divinités après celui entre Huangdi et Chiyou. Zhanxu et Yuqiang eurent tous des pouvoirs magiques et l'emportèrent progressivement sur Gonggong qui, n'ayant pas la force de résister, céda peu à peu. Le champ de bataille se déplaça près d'une montagne dans les landes au nord-ouest. Cette montagne, originellement un des piliers célestes qui liaient le ciel et la terre, s'élevait jusqu'au nuages. Devant la défaite, Gonggong voulut périr avec Zhanxu. Il heurta d'un coup la montagne. Avec un bruit assourdissant, la montagne se cassa en deux : dès lors on l’appela Mont Buzhoushan (Montagne cassée).

Sans le support de ce pilier, le ciel pencha vers le nord-ouest. Le soleil, la lune et les étoiles emprisonnés par Zhanxu au nord s'y échappèrent et se déplacèrent vers le nord-ouest. Dès lors ils se retrouvaient dans l'orbite de l'est à l'ouest. Lorsque Gonggong se heurta contre le Mont Buzhou, un câble suspendant la terre au ciel se brisa en même temps, la terre sombra vers le sud-est. Ainsi la plupart des fleuves en Chine courent vers le sud-est.

L'ordre invulnérable de Zhanxu fut détruit par le choc de Gonggong et personne ne le répara après. l'univers entra dans une nouvelle ère, l'état cosmique d'aujourd'hui. Pendant le combat Gonggong se réfugia sous l'eau et ses subordonnés s'enfuirent dans toutes les directions.  Pendant la dynastie Han, on pensait que Zhanxu après sa mort était devenu l'Empereur céleste du nord. Il s'occupait alors de l'hiver.

Selon les légendes populaires, le 18 mars du calendrier lunaire est l'anniversaire de Zhanxu, ce jour-là on lui offre des sacrifices.

Le Temple du Cheval Blanc à Luoyang


Le Temple du Cheval Blanc (Baima si), proche de Luoyang, est la plus ancienne fondation bouddhique de Chine qui date des Ming (1368-1644). Il fut plusieurs fois restauré sous les Ming, les Qing et de 1952 à 1957. Saccagé pendant la Révolution culturelle, le temple a dû être à nouveau restauré ; on l'a pourvu de statues provenant d'autres monuments.

Devant l'entrée, un cheval de pierre taillé sous les Song, rappelle la légende de la fondation de ce monastère. De part et d'autre de la premère cour, deux tertres, entourés d'un muret en pierre, sont ombragés de grands arbres. Ce sont les tombeaux des moines à l'origine de la fondation : Kasyapa Matanga et Zhou Falan.

Selon la légende, l'empereur Ming eut un rêve : un homme d'or volant dans le ciel, vint se poser dans la cour de son palais. Le sage Fuyi interpréta ce songe singulier : le souverain avait reçu la visite d'un immortel, venu d'un pays par-delà les Kunlun. Han Mingdi dépêcha 12 envoyés vers la contrée de ce sage, pour y recueillir son enseignement. La délégation revint avec les premiers sûtras, dont les canons des Quarante-Deux Articles, premier a être traduit en chinois mais aussi deux religieux : Kasyapa Matanga et Zhou Falan. Pour les accueillir et recueillir les textes de leur doctrine, l'empereur fit construire près de Luoyang, sa capitale, un "si", terme qui désignait alors une maison d'hôtes et sert aujourd'hui pour les couvents bouddhiques. Il fut baptisé "si du Cheval blanc", en mémoire de l'animal qui avait convoyé les textes saints depuis les contrées occidentales.

En face de l'entrée du Temple se trouve la Salle des Rois célestes (Tianwang dian). On trouve sous un dais de bois sculpté et doré d'époque Ming, trône un Bouddha des temps futurs (Maitreya). Derrière un écran, une statue en argile dorée lui tourne le dos : c'est celle du Weiduo, chef des 32 généraux célestes qui dépendent des Quatres Rois des quatres points cardinaux.

Dans la salle du Grand Bouddha (Dafo dian), on trouve sur l'autel un Bouddha en argile, modelé sous les Ming, siège encadré de deux disciples et des bodhisattva Manjusri (Wenshu) et Samantabhadra (Puxian). Les pavillons disposés de part et d'autre sont à gauche, la salle des Ancêtres (Zutang) et celle de la méditation (Chantang) ; à droite, une ancienne hostellerie.

Dans la 3ème salle, la Grande Salle majestueuse (Daxiong dian), se trouvent trois statues en bois laqué et doré. Les côtés latéraux sont ornés d'une série de neuf arhat en bois polychrome qui remonteraient au XIIIème siècle. Devant les statues du centre se trouvent cinq beaux vases en émaux cloisonnés qui datent du règne de l'empereur Qianlong (1736-1796).

Dans le 4ème bâtiment, nommé la Salle de l'Entrée en retraite (Jieyin dian), trône Amithaba, le Bouddha qui règne dans le Paradis de l'Ouest, ou plutôt le Monde de Délices de la région occidentale (Xifang jiluo shejie). Le Bouddha est flanqué des bodhisattva Guanyin et Dizang.

Au bout de l'axe du temple se trouve la terasse de la Fraîcheur (Qingliang tai), dont les murs de soutènement en brique, dateraient des Yuan. Une inscription relate les circonstances de l'arrivée des sûtras à Luoyang, tandis qu'une stèle du temps de l'empereur Kangxi (1662-1722) est dite "au texte coupé" car les caractères y sont disposés horizontalement et non verticalement. A 500 mètres du temple se trouve la Pagode des Nuages accumulés, une pagode en brique de 13 étages qui dépendait d'un monastère voisin aujourd'hui disparu.

Han Xiangzi, un des 8 immortels du taoïsme


Han Xiangzi est l'un des huit immortels du taoïsme. Neveu du grand lettré Han Yu (768-824), il était dépouillé de toute ambition et mena une vie sans soucis. Il rencontra Lü Dongbin, qui l'initia au tao. Aux critiques de son oncle qui voulait qu'il choisisse une carrière "sérieuse", il répondit qu'il n'avait pas la même ambition que lui, et, enjoint de composer un poème, écrivit sur-le-champs une poésie sur l'immortalité. Comme Han Yu lui demandait si il était capable de maîtriser les transformations, il fit apparaître un pot de vin dans lequel était fichée une pivoine verte. Sur les pétales de la fleur étaient inscrits des caractères dont Han Yu ne comprenait pas le sens ; mais Han Xiangzi lui rétorqua qu'il les comprendrait plus tard.

Peu après Han Yu fut condamné à l’exil dans la région de Chaozhou pour avoir écrit un texte où il se moquait de la réception à la Cour d'une relique de Bouddha. Se rendant dans le sud, en passant par un col de montagnes, il fut arrêter par une tempête de neige. Son neveu surgit alors devant lui, lui rappela les vers inscrits sur la fleur qui faisaient allusion à son éloignement du foyer et à son cheval entravé par la neige. Han Yu compris la valeur de son neveu et reprit ces deux vers dans un poème. Il passa la nuit avec lui et apprit ainsi que son exil prendrait vite fin et qu'il retrouverait un poste encore plus élevé.

Han Xiangzi est souvent représenté en jeune lettré jouant de la flûte et il est d'ailleurs le patron des musiciens. Sa musique attirait les oiseaux et les autres animaux. Parmi ses nombreux pouvoirs magiques, il pouvait à volonté faire pousser fleurs et plantes.

Zhong-li Quan, un des 8 immortels du taoïsme


Zhong Liquan était le fils d'un fonctionnaire noble de la dynastie Han. Sa naissance fut marquée par l'apparition d'une vive lumière. il ne pleura ni ne cria, ne mangea ni ne but pendant sept jours, au bout desquels il bondit en s'écriant : "je veux aller m'amuser à la capitale de jade et dans la demeure pourpre où vivent les immortels".

Devenu adulte, il fit une carrière de fonctionnaire et fut nommé général en chef d'une expédition contre les barbares, mais, vaincu, il s'enfuit seul à cheval par un défilé et perdit son chemin. Au milieu de la nuit, il rencontra un moine barbare qui le guida jusqu'à une chaumière et lui dit : "C'est ici que Maître Donghua cultive le tao, vous pouvez vous y reposer", puis l'ayant salué, il s'en alla. Zhong Liquian  hésitait, n'osant déranger le maître du lieu. Il entendit une voix à l'intérieur dire : "C'est sûrement ce moine étranger aux yeux verts qui a trop parlé". puis il vit sortir un vieillard, portant une cape en peau de daim blanc et s'appuyant sur un bâton qui lui demanda : "Vous n'êtes pas le général Zhong Liquan de la cour des Han? Pourquoi ne vivez-vous pas dans une demeure de moine dans la montagne?"

Zhong Liquan, surpris, comprit qu'il s'agissait d'un homme extraordinaire et lui demanda de lui enseigner le Tao. Au bout de quelques temps, il repartit et quand il se retourna une dernière fois, il s'aperçut que la chaumière avait disparu en un clin d'oeil. Il rencontra ensuite plusieurs immortels qui l'initièrent plus profondément dans la connaissance du tao et les techniques d'immortalité si bien qu'il put parcourir l'empire en voyageant sur les nuages.  Durant de nombreuses années il se chargea de transmuter grâce à une drogue alchimique de sa composition, le cuivre et l'argent, qu'il distribuait aux pauvres. Zong Liquan apparait comme un homme bien en chair, la panse dévêtue, tenant une pêche (le fruit symbole d'immortalité) ainsi qu'un éventail qui lui sert à rendre la vie aux âmes des morts. Il fait partie du groupe des 8 immortels du taoïsme et vécu de nombreuses aventures avec eux.

Li Tieguai, un des 8 immortels du taoïsme


Les immortels chinois (xian) ne sont pas des dieux. Ce sont des humains qui ont trouvés la voie de l’immortalité et qui n’exercent pas de fonction particulière et qui apparaissent sur terre au gré de leur caprice.
C’est le taoïsme qui a vraiment dévelloppé cette notion d’immortalité, la capacité de prolonger la vie par delà la mort sous la forme de pur esprit. De nombreux rites et excercices physiques, intellectuels, sexuels et spirituels devaient y conduire. On y parvenait pleinement par l’union avec le Tao.

Li Tieguai est l’un des immortels les plus connu. Appelé aussi Kong Mu, est toujours représenté avec sa canne de fer ainsi qu'une gourde contenant des potions magiques. Il avait atteint très tôt le Tao, auxquels deux immortels l’avaient initié, et vivait sur une montagne. Un jour, devant se rendre au mont Huangshan pour y rencontrer le célèbre Laojun, il dit à son disciple : « Je vais laisser mon corps ici sous ta garde pendant que mon esprit ira au rendez-vous avec Laojun. Si dans sept jours je ne suis pas revenu, incinère mon corps ». Le disciple ayant appris que sa mère était gravement malade, voulu aller à son chevet et, comme son maître était absent depuis six jours, il se dit qu’il pouvait déjà incinérer sa dépouille.

Mais le septième jour, Li Tieguai revint et, ne trouvant plus son corps, emprunta celui d’un mendiant infirme qui venait de mourir. Dès lors il dut s’appuyer sur une béquille et resta estropié, ne pouvant s’appuyer que sur une seule jambe quand il apparaissait sur terre. Il tient également une gourde, héritage du mendiant, qui lui valut de devenir le protecteur très populaire des débits de boissons.

 On dit que Li Tie-guai ressuscita sa propre mère en lui faisant boire un de ses breuvages. Il devint par la suite le patron des apothicaires. Il est l'un des 8 immortels du taoïsme.

Zang Guolao, un des 8 immortels du taoïsme


Zang Guolao était un taoïste qui naquit dans la province du Shanxi sous la dynastie Tang. Il chevauchait un âne blanc avec lequel il pouvait parcourir des milliers de lieues en un jour. A l’arrête, il le repliait comme une feuille de papier, le plaçait dans sa besace et crachait dessus une gorgée d’eau quand il voulait lui faire reprendre sa forme animale. Il est l'un des huit immortels taoïstes.

Les empereurs Taizong (626-649) et Gaozong (649-683) l’invitèrent pour qu’il occupa un poste officiel mais il refusa, et quand l’impératrice Wu Zetian (684-704) insista, il fit semblant d’être mort ; comme son corps exposé au soleil commençait à pourrir et à être attaqué par les vers, l’impératrice crut qu’il était vraiment mort. On le vit ensuite se promener dans sa province sur le mont Hengshan.

En 736, l’empereur Xuanzong y envoya d’abord un émissaire le chercher, mais, comme il fit de nouveau semblant d'être mort, il dépêcha deux dignitaires avec un ordre impérial gravé sur une plaque de jade. A Loyang, le souverain le reçut dans la salle de la Réunion des sages avec de grands honneurs, mais Zhang Guolao refusa de répondre aux questions. Puisqu’il restait plusieurs jours sans manger, se contentant d’un peu de vin, l’empereur lui offrit à boire, mais il répondit : « Je ne bois que deux tasses ; en revanche, j’ai un disciple capable d’absorber un boisseau d’alcool ». Un jeune taoïste descendit alors en volant d’une solive de la salle ; après avoir bu un boisseau, il eut beau refuser, l’empereur insista pour qu’il continue, et réussit à le soûler. Mais l’alcool surgit du sommet de sa tête, faisant tomber sa coiffe, et en un éclair, ce jeune taoïste se transforma en coupe en or que l’assistance reconnut comme faisant partie de la vaisselle du palais.

Il resta ainsi quelques temps à la cour mais fatigué de cette vie trop luxueuse, il finit par retourner sur le mont Hengshan et fit le mort une nouvelle fois quand l’empereur le rappela. Celui-ci fit alors élever un temple en son nom. Zhang Guolao avait l’apparence d’un vieillard d’une soixantaine d’années et affirmait qu’il était né sous l’empereur mythique Yao.

Lü Dongbin, un des 8 immortels du taoïsme


Lü Dongbin est le plus célèbre des immortels ; des autels et des temples ont été élevés en son honneur ; on le consulte par la planchette, car il se manifeste souvent sur terre pour combattre des démons ou faire passer des êtres au stade d'immortels. On le considère souvent comme le meneur des 8 immortels du taoïsme. Il naquit en 798. Son grand-père et son père étaient de hauts fonctionnaires. Avant sa naissance, sa mère vit en dormant une grue arriver dans la chambre, baignée d'un parfum extraordinaire, tandis que résonnait une musique céleste, puis l'oiseau disparut. Devenu adulte, il rencontra sur le mont Lushan un taoïste qui |'initia aux pouvoirs magiques des épées. Malgré son savoir, il échoua aux examens impériaux.

A soixante-quatre ans, il rencontra dans une auberge de la capitale un taoïste qui avait écrit trois poèmes sur le mur et qui l'invita à en faire autant. Lü Dongbin écrivit un poème dont le sens était qu'il ne voulait plus rechercher la gloire et l'intérêt, mais atteindre à l'immortalité. Le taoïste se présenta comme étant Zhong Liquan et l'invita à le suivre pour dîner.

Tandis qu'on faisait cuire le millet pour le repas, Lü Dongbin s'assoupit et rêva d'une vie qui le menait au sommet des honneurs et de la félicité, mais qui finissait par sa séparation d'avec sa femme, sa condamnation à l'exil, et se retrouvant aux abois dans une tempête de neige, il se réveilla pour découvrir que le millet n'était même pas encore cuit. Ce rêve lui avait été envoyé par Zhong Liquan pour qu'il prenne conscience du fait que la vie n'est qu'un songe. Lü Dongbin le salua comme son maître et mena une vie retirée, mais il dut subir les dix épreuves suivantes pour voir s'il pouvait atteindre le Tao :

Quand il rentra chez lui, il découvrit que toute sa famille était morte de maladie. Sans se laisser émouvoir, il se contenta d'acheter les cercueils nécessaires et heureusement les morts ressuscitèrent. Comme il s'était fait marchand ambulant pour vivre, un client ne lui donna que la moitié de ce qu'il lui devait, mais il s'abstint de discuter, et le client reposa ce qu'il avait acheté. Un jour de nouvel an, il donna beaucoup d'argent à un mendiant et se contenta de sourire quand celui-ci l'insulta en trouvant que ça ne suffisait pas. Tandis qu'il gardait un troupeau sur une colline, apparut un tigre affamé; Lü Dongbin protégea ses bêtes en faisant écran avec son corps, et le tigre partit. 

Tandis qu'un soir il étudiait dans une chambre, apparut une jolie jeune fille qui demanda à passer la nuit et flirta avec lui, mais pendant les trois jours où elle resta, il ne se laissa pas tenter. Alors qu'il était dans le besoin, tout ce qu'il avait lui fut dérobé ; il resta imperturbable et trouvant ensuite un trésor en bêchant, il le ré-enterra sans le prendre. Il acheta un objet en cuivre et une fois chez lui s'aperçut que c'était de l'or ; il alla aussitôt le rendre au marchand. Un taoïste vendait un médicament qu'il disait mortel mais assurait qu'il permettait d'atteindre le Tao dans la prochaine vie ; comme au bout de dix jours il n'avait toujours rien vendu, Lü Dongbin eut pitié de lui, lui acheta son remède, et sur l'insistance du taoïste, se crut obligé de l'absorber, mais ceci fut sans effet aucun. 

Traversant un fleuve en bateau au cours d'une tempête, il fut le seul passager à rester impassible. Finalement, alors qu'il était assis seul dans sa chambre, il fut assailli par toutes sortes de démons et vit un condamné dégoulinant de sang qui prétendait qu'il l'avait tué dans une existence antérieure et réclamait vengeance. Lü Dongbin prit son épée pour se tuer en disant qu'il était normal de payer de sa vie quand on avait causé la mort, mais alors toute cette scène s'évanouit devant ses yeux ; Zhong Liquan apparut en frappant dans ses mains et lui annonça qu'ayant réussi les dix épreuves, il pouvait atteindre le Tao.

Il voulut ensuite lui enseigner la magie pour transformer les tuiles en or et ainsi soulager la misère des hommes, mais quand Lü Dongbin apprit qu'au bout de trois mille ans l'or redeviendrait tuile, il refusa car ce serait tromper les générations postérieures. Lorsque Zhong Liquan remonta au ciel, il préféra rester sur terre pour sauver tous les humains et chasser les démons, et plusieurs personnes prétendirent l'avoir vu dans la vallée du Yangtse.

On retrouve dans cette hagiographie des éléments repris du bouddhisme : la tentation par la jeune fille et les démons, l'offrande de son corps à un tigre pour sauver des animaux, la volonté d'un bodhisattva de ne pasquitter ce monde tant que tous les hommes ne seront pas sauvés ; et des éléments confucianistes : ce souci moral d'un partait détachement de l'intérêt personnel, cette honnêteté extrême, mais tout ceci dans un contexte taoïste.

En 1112, un demon sévissait au palais impérial, s'emparant de bijoux et de concubines. L'empereur en faisant la sieste vit en rêve un taoïste ; celui-ci lui dit venir s'emparer de ce démon ; il appela un guerrier en armure avec qui il attrapa le trublion, et il l'avala. Puis répondant à des questions de l'empereur, il révéla que le guerrier était Guan Yu et que lui-même était Lü Dongbin. Comme dès lors plus rien ne se produisit dans le palais, un autel lui fut élevé. Dans de nombreux autres récits, Lü Dongbin se manifesta en laissant un poème ou un texte et il est resté un immortel particulièrement populaire.