La légende de Ren Xu


Au début de l'époque Jianzhong de la dynastie des Tang, habitait à Le'an un lettré du nom de Ren Xu. Plus attaché à la lecture qu'au monde, il vivait dans des montagnes fort reculées, où il voulait rester toute sa vie. Un jour, assis dans son studio, il entendit quelqu'un frapper à sa porte. Il vit alors entrer un vieillard vêtu de jaune qui, le visage beau, l'allure élégante, se dirigea vers Ren en s'appuyant sur un bâton. Ren l'invita à s'asseoir et à bavarder. Surpris par l'air soucieux et les balbutiements du vieillard, il lui demanda quel était l'objet de son angoisse.

-Peut-être êtes-vous préoccupé par la maladie d'un des vôtres? ajouta Ren.
- J'attendais votre question depuis un certain temps, répondit le vieillard. je ne suis pas un homme mais un Dragon. A un li d'ici, à l'ouest, il y a un lac. Ma famille y habite depuis quelques centaines d'années. Mais maintenant je souffre à cause d'un homme méchant. Vous êtes le seul à pouvoir me sauver d'une catastrophe mortelle. Je viens chez vous vous demander secours. Heureusement qu'en me posant cette question, vous m'avez donné l'occasion d'en parler.

Je ne suis qu'un mortel d'ici-bas, fit le lettré. A part la poésie, les livres classiques, les rites et la musique, je ne connais pas d'autres arts. Comment pourrais-je vous sortir du malheur?
- Vous n'avez qu'à faire ce que je vais vous dire. Nul autre art n'est nécessaire, répondit le vieillard.
- Alors je vous écoute avec plaisir.
- Après-demain matin vous irez au bord du lac. Vers midi, un taoïste arrivera de l'ouest. C'est lui qui me veut du mal. Il va drainer l'eau du lac et me tuer. Quand il aura presque asséché le lac, vous crierez d'un ton sévère :
"Le Ciel va condamner à mort celui qui assassine le Dragon Jaune !"

Alors l'eau reviendra dans le lac. Mais le taoïste réitérera sa sorcellerie, et vous répéterez le même cri. Quand vous aurez agi trois fois de la sorte, je serai sauvé et vous serez richement récompensé.
Le lettré ayant acquiescé, le vieillard lui adressa ses remerciements sincères et le quitta à regret.


Deux jours plus tard, Ren se rendit à l'ouest de la montagne où il vit en effet un grand lac. Il s'assit sur le bord pour attendre.
  A midi, un nuage arriva en flottant de l'ouest et atterrit lentement au bord de l'eau. Un taoïste, haut d'environ dix pieds, sortit du nuage et se tint debout sur le bord. Il tira de sa manche quelques talismans couverts de caractères noirs, qu'il jeta dans l'eau. Le lac s'assécha aussitôt, découvrant ainsi un Dragon Jaune allongé dans le sable.

Ren cria d'un ton sévère :
- "Le Ciel va condamner à mort celui qui assassine le Dragon Jaune !"
A peine sa phrase était-elle prononcée que le lac s'était à nouveau rempli d'eau. Indigné, le taoïste jeta plusieurs talismans couverts de caractères rouges dans le lac qui s'assécha d'un coup.
Alors Ren cria à tue-tête, et l'eau remplit à nouveau le lac. Fou de rage, le taoïste ne tarda pas à lancer en l'air une dizaine de talismans écarlates qui se métamorphosèrent en nuages rouges. A peine ceux-ci entrés dans le lac, l'eau disparut comme par enchantement. Mais aux cris du lettré, elle revint.
- "Ah ! il m'a fallu dix années pour réussir à avoir la possibilité de manger ce Dragon. Vous qui êtes un lettré, pour quelle raison daignez-vous sauver une bête ?" s'écria le taoïste. Et après lui avoir fait d'autres reproches, il s'en alla.

Revenu dans les montagnes, la nuit, Ren fit un rêve dans lequel il vit le même vieillard qui venait le remercier.
- "Vous m'avez sauvé de la main du taoïste, je vous en suis profondément reconnaissant. Je voudrais vous offrir une perle. Veuillez venir la chercher au bord du lac."

Le lendemain, Ren se rendit sur la rive du lac, où, dans les herbes, il trouva une grosse perle scintillante, dont il ne connaissait pas le nom. Plus tard, il l'apporta au marché de Guangling. Un étranger s'exclama devant cette merveille :
- "Voilà le vrai trésor inestimable du Dragon du Mont Li. Personne ici-bas ne peut l'obtenir !"

Et il la paya des dizaines de millions de sapèques.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire